Une fois bien acclimatés à l’air des montagnes de San Gil, on a légitimement pensé qu’on était indestructibles et qu’on pouvait s’attaquer à plus ardu. Etait-ce prématuré ? Présomptueux ? Prévaricateur ? Un autre adjectif commençant par « pré » ? La réponse en deux étapes ci-dessous !

Guadalupe : baignade dans un gruyère

Depuis San Gil, on avait prévu une dernière étape dans le département de Santander : le village de Guadalupe, niché dans les montagnes nuageuses et jusqu’ici peu exploré par les touristes étrangers. Peut-être parce que pour y aller, il faut déjà arriver jusqu’à Oiba (qui n’a absolument rien de spécial), puis sauter à l’arrière d’un pick-up et attendre patiemment que l’heure de trajet sur une route cahoteuse transforme votre coccyx en pâte à crumble.

Ceci étant dit, le village en lui-même est assez mignon : le Parque Central, recouvert de palmiers titanesques et gouverné par une imposante église, est assez impressionnant et semble hors de proportion par rapport aux petites rues qui l’environnent. Depuis le parvis de l’église, on peut admirer entre les stipes des palmiers (et j’insiste là-dessus chers lecteurs : ce ne sont pas des troncs !), les cimes cotonneuses des montagnes alentour.

Puis, équipé de son pantalon et de son pull contre la fraîcheur de l’air ambiant, on peut parcourir les ruelles à la recherche d’un restaurant… Et ne pas en trouver, car ciel, il est déjà 18h ! Ce qui est, soit dit en passant, un excellent moyen d’atterrir dans la salle à manger d’une habitante et de manger des œufs brouillés, des plantains et du riz avec un lait fraise ! Le tout pour une bouchée de pain !

Mais l’attraction de la région, c’est la rivière Las Gachas, dans la montagne, à l’extérieur du village : un cours d’eau ruisselant sur un substrat lisse de roches rouges, où sont creusés de grands puits. Pour y parvenir, il faut sortir du village et parcourir la montagne sur un sentier pavé, puis le long d’exploitations agricoles et enfin au milieu de vastes étendues de verdure où paissent (et/ou courent) des vaches.

Arrivé à la rivière, on quitte les chausses et on remonte le lit pieds nus à la recherche de la parfaite piscine où s’immerger dans le simple but de prendre un délicieux rafraîchissement avec vue sur les montagnes !

Informations pratiques :

  • Dodo : Hotel Colonial, 40 000 COP la chambre double avec sdb privée
  • Manger : Bonanza, almuerzos à 10 000 COP, et le soir c’est à la débrouille !

Mongui, le portail intersidéral

Prochaine étape : le département de Boyaca, juste au nord de Bogota. Ayant décidé de faire l’impasse sur Villa de Leyva, nous sommes allés directement à Sogamoso, d’où trois quarts d’heure de bus nous permettent de gagner le village patrimonial de Mongui, perché à 2900m d’altitude.

Mongui c’est joli, et tout le monde doit le savoir : au besoin, la banderole « Pueblo mas lindo de Boyaca – ganador de ganadores », les dizaines de touristes locaux déambulant sur la place principale et les glaces à 8000 pesos sont là pour nous le rappeler. Mais Mongui, c’est aussi -et ne nous demandez pas d’où ça sort- la capitale nationale du ballon de foot cousu main ! Sur la place de l’église, un monument de pierre rend hommage aux couturiers, qui vendent leurs sphères de cuir multicolore dans les ruelles attenantes.

Mais ce qui nous intéresse par-dessus tout, c’est que Mongui est la base pour aller randonner dans le paysage surréaliste du paramo de Oceta. A ce stade, quelques explications sont nécessaires :
Le paramo est un écosystème de montagne très particulier, qu’on ne rencontre que dans la partie nord-ouest de l’Amérique du sud et un peu en Amérique centrale. Le climat y est frais et humide, et on y trouve une végétation majoritairement herbacée et arbustive. Mais au milieu de ces plantes basses s’élèvent de grandes plantes en rosette, appelées localement frailejones et mises à l’honneur sur les pièces de 100 pesos colombiens.

Elles ressemblent à des espèces de petits palmiers trapus, leurs épaisses feuilles et leurs fleurs jaunes sont toutes duveteuses, et les gens qui n’ont plus le moindre brin de poésie dans le cœur les classent dans la famille des Asteracées, au sein du genre Espeletia. Elles ont constamment la tête dans les nuages, dont elles récupèrent l’eau pour la déverser dans le sol, ainsi transformé en grosse éponge.

Et quand elles s’alignent par centaines à flanc de montagne, en bord de lagune ou de cascade, au milieu des arnicas jaunes et des lupins violets, on a l’impression d’être sur une autre planète ! Comme Avatar, sauf qu’on peut pas se balader à poil.

Hé non, parce qu’à quasiment 4000m d’altitude, il commence à faire sévèrement froid ! Et en plus, on est gentiment arrosés par une petite bruine qui ne fait rien pour arranger le schmillblick. Autant dire un superbe baptême du feu pour nos vêtements chauds, qui par ailleurs relègue la chaleur de la côte caraïbe au rang de lointain souvenir !

Heureusement pour nous, malgré la pompe cardiaque qui tourne un peu plus fort que d’habitude, le mal des montagnes ne se mêlera de rien, notre guide restera attentif à notre rythme modéré, et acceptera même de raccourcir un peu le tour pour éviter de nous ramasser à la petite cuillère. Et en redescendant, on trouvera une bonne dose de réconfort dans le soleil réchauffant la place du village, et dans les genovas, des petites boulettes de porc froides typiques de la région, à déguster avec un petit pain !

Pour la suite des aventures, un petit crochet par Bogota avant de s’envoler pour la Macarena et le fleuve multicolore de Caño Cristales !

Informations pratiques :

  • Dodo : à Mongui, hostel familial juste à côté de La Casona (60 000 COP la chambre double avec sdb partagée) ; à Sogamoso, Hotel Los Esteros, en face du terminal (30 000 COP la chambre double avec sdb privée)
  • Manger : à Mongui, almuerzos à 6000 COP derrière la Capilla ; à Sogamoso, almuerzos à 6000 COP en face du terminal
  • Sortie Paramo : avec Felix Montañes, dit « El Poeta », 50 000 COP la randonnée aller-retour
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